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Le football algérien avant 1962

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Posted By : Les Authentiques Mouloudéens 1921

Friday : 12/06/2015

 

LE FOOTBALL ALGERIEN AVANT 1962


Le football est arrivé en Algérie dans les dernières années du XIX° siècle. Et les auteurs estiment que les premiers clubs, constitués à l’initiative des Européens, immigrés en Algérie, l’ont été en Oranie et plus précisément dans la ville d’Oran.
D’aucuns désignent le Club des Joyeusetés (CDJ) d’Oran comme le plus ancien. Il aurait été créé en 1894 ! Pour le titre de doyen des clubs, d’autres avancent le nom du Club Athlétique Liberté d’Oran (CALO)…Au fur et à mesure, d’autres clubs verront le jour dans toutes les régions d’Algérie. Des équipes souvent à forte connotation communautaire, française, mais aussi espagnole, maltaise ou encore israélite.
Plus tard, la fin de la guerre 1914-18 va entraîner la création de clubs de football musulmans allant jusqu’à constituer, par la suite, le quart de l’ensemble des clubs de football existant alors en Algérie. Il en fut ainsi du Mouloudia Club d’Alger (MCA en 1921), le Gallia Club de Mascara (GCM en 1925) et de l’Union Sportive Musulmane d’Oran (USMO en 1926), la même année que le Club Sportif de Constantine (CSC) suivis de tant d’autres dans presque toutes les villes. Le Mouloudia tirant son nom du jour de sa création, à savoir, la fête du «Mouloud», date  anniversaire de la naissance du Prophète Mohammed (QSSSL).
A propos de l’ancienneté du Mouloudia d’Alger en tant que doyen des clubs musulmans, il est nécessaire de parler de l’existence, à Alger, à compter de 1895, d’un club omnisports musulman : l’Avant-Garde Vie au Grand Air. On sait peu ou rien sur la section football. Elle a pourtant dû exister. Et pour cause, si l’on en  croit un communiqué de presse, dont je n’ai malheureusement point gardé copie, paru en 1963, si ma mémoire ne me fait point défaut, dans les colonnes d’Alger Républicain. Un groupe de personnes ( 5 ou 6) citées nommément s’exprimait, au nom du club, pour dire en résumé ce qui suit :
Que l’AGVGA avait naguère décidé de mettre volontairement en sommeil sa section football, lors de la création du MC Alger
Que l’AGVGA allait sous peu reprendre ses activités
Une précision mentionnée ici à toutes fins utiles.
On peut ajouter que Didier Rey, que j’évoquerai plus avant, a noté, à partir des documents officiels de déclarations  d’associations du Département d’Oran, la création en 1913 du FC Musulman de Mascara. Peu de choses également sont connues sur ce club de football qui sans doute n’a pas eu une longue existence.
Et pour en terminer nous n’omettrons pas de signaler qu’un groupe de supporteurs du Club Sportif de Constantine, n’ont eu  de cesse, et ce, jusque dans les années 1980, de revendiquer, par voie de presse, pour leur club favori, le titre de doyen des clubs musulmans. La faille principale dans les arguments avancés résidait dans le fait que le club avait changé de dénomination avant d’adopter celle de CSC. Néanmoins sur le blason du club on peut toujours lire de nos jours la date de 1898.
Afin de reprendre la chronologie des faits, il faut dire que la France était affiliée à la FIFA depuis 1904. Pourtant à cette époque la Fédération française de football (FFF) n’existait pas encore. Elle le sera en 1919. Toujours est-il que c’est à ce moment-là, donc après la première guerre mondiale, que les différents clubs d’Algérie ont adhéré à la FFF et furent regroupés dans 3 Ligues distinctes, calquées sur les 3 départements administratifs créés en 1848 : Oran, Alger et Constantine, ligues au sein desquelles ils disputeront leur premier championnat de Division d’Honneur à partir de la saison 1920-21. Toutefois, pendant près de 40 années, il n’y aura pas de titre de champion d’Algérie, mais seulement un champion pour chacune des  3 Ligues. Le palmarès par Ligue figure à la fin de ce chapitre.
Pas de champion d’Algérie. En revanche il y eut, à partir de 1920-21, à l’initiative de l’Union des Ligues nord africaines (ULNA), un championnat d’Afrique du Nord, disputé par les champions des 3 Ligues d’Algérie en compagnie de leurs homologues du Maroc et de Tunisie. Plus tard, en 1930, sera créée une Coupe d’Afrique du Nord,  réservée, elle, aux clubs autres que le vainqueur du championnat des 5 Ligues nord africaines, au nombre de 8 d’abord puis de 32 équipes par la suite. Ces deux compétitions connurent de gros succès d’affluence dans les 3 pays voisins. Je peux en témoigner. Les lauréats des compétitions nord africaines figurent également en fin de chapitre. A côté de ces deux compétitions de clubs, il existait aussi un Tournoi des Ligues qui verra s’opposer à partir de 1925, les sélections de chacune des 5 Ligues nord africaines, à tour de rôle, au siège de l’une des Ligues.

Retournons à nos clubs musulmans en disant que, dans leur Ligue respective, ils ont eu à affronter des équipes européennes plus nombreuses, plus riches et beaucoup mieux structurées. Pendant longtemps, l’USM Oran d’une part, le MC Alger d’autre part, seront, chacun de son côté, seuls à faire face aux ténors de l’Oranie et de l’Algérois qui avaient pour nom AS Marine Oranaise, Club des Joyeusetés ou Sporting de Sidi Bel Abbés, FC Blidéen, AS Boufarik, Gallia d’Alger et AS St Eugène. Dans l’Est du pays on pourrait citer les meilleurs clubs européens qui se trouvaient surtout à  Bône (Annaba) : l’AS Bône et la JBAC. Et sur le terrain, tout comme dans les gradins, ce ne sont pas seulement les couleurs de leurs clubs que les joueurs algériens défendaient. L’élan communautaire et la fibre nationaliste ayant sans cesse inspiré les acteurs musulmans et dominé les débats…
Mais les obstacles, auxquels ont eu à faire face les clubs musulmans, n’étaient pas seulement et purement d’ordre sportif. En effet, dans la situation coloniale que vivait le pays, la constitution d’équipes strictement musulmanes n’était pas pour plaire aux autorités locales. Sans les interdire, elles vont s’efforcer de leur imposer, par des textes réglementaires et autres circulaires, un certain nombre de mesures les obligeant par exemple, à prévoir, en leur sein, un quota de joueurs non musulmans ou encore en leur interdisant de changer le nom du club (en vue de l’arabiser), sous peine de se voir rétrograder au fin fond de l’échelle des compétitions, enfin de devoir inclure l’adjectif « français » dans le nom du club. C’est pour cette raison qu’il y eut des équipes dénommées : l’Union Sportive Franco Arabe de Tlemcen (USFAT), l’Union Sportive Franco Musulmane de Sétif (USFMS)  ou bien l’Espérance Sportive Franco Musulmane de Guelma(ESFMG).
Choisissant pour exemple la Ligue d’Oran et le club de l’USM Oran, Didier Rey, professeur à l’Université de Corte, a narré, dans une étude remarquable et originale presque dans le détail, les péripéties restrictives endurées par les clubs de football musulmans, en Algérie à cette époque, beaucoup mieux que je le ferais ici moi-même.  Voir : « Le temps des circulaires ou les contradictions du football colonial (1928-1945) » Didier REY.
Ainsi écrit-il, et je cite : « Après de graves incidents survenus dans le championnat de la Ligue de Constantine, une circulaire du Gouverneur général de l’Algérie décréta en 1928, l’interdiction des rencontres entre les clubs sportifs composés les uns d’européens les autres d’indigènes ». Le texte invitait aussi instamment les autorités sportives locales « à faire fusionner les clubs musulmans et les clubs dits européens et ce, en vue de la disparition totale des associations et sociétés sportives musulmanes ». Ces mesures à caractère répressif rencontrèrent à l’évidence une très grande résistance aussi bien passive qu’active des clubs musulmans. Mais aussi de la part des clubs européens qui ne souhaitaient pas se voir « envahis » par des joueurs « indigènes ». Sans omettre de signaler l’opposition des différentes Ligues sportives, lesquelles, bien que dirigées par des européens, n’appréciaient guère l’intrusion de l’administration coloniale dans leurs affaires.
Les clubs musulmans plieront sans se briser : le MCA et  l’USMO conserveront leur nom d’origine ; d’autres clubs seront même créés avec l’appellation type : Union Sportive Musulmane, Jeunesse Sportive Musulmane ou Espérance Musulmane et fleuriront ailleurs, notamment à Blida, Sidi Bel Abbés, Mostaganem et Bône (Annaba) etc…avec de nouveaux Mouloudia à Constantine, Bejaia et Saïda notamment.
Cette législation répressive sera allégée, oubliée ou renouvelée au gré des circonstances que dictait l’évolution politique. D’une part la montée des sentiments nationalistes n’augurait rien de bon pour les autorités coloniales. D’autre part la seconde guerre mondiale et l’émergence du régime de Vichy, feront  passer au second plan les préoccupations de cette nature.
Ceci dit, ces clubs vont faire face en dépit des aléas et des obstacles, sachant « surfer » sur la bonne vague afin de ne pas perdre leur âme.  Didier Rey nous apprend ainsi  « qu’en vue de tourner les difficultés, le club de l’USM Oran s’est, à un moment donné, offert un européen pour président. Et pour respecter la règle du quota, ce club engagera jusqu’à 30 joueurs d’une équipe israélite qui venait de s’auto dissoudre. Ce transfert massif fut rejeté par les autorités.»  Elles considéraient sans doute, mais sans le dire, que les Juifs n’étaient pas français. Le décret Crémieux leur avait pourtant bien accordé la nationalité française depuis 1870 ! Bref ! Les clubs musulmans sauront se défendre, à la fois sur les terrains de football, mais aussi contre l’adversité multiple et multiforme qui ne se résumait pas aux seuls onze joueurs de l’équipe d’en face. Didier Rey rapporte des situations cocasses et ubuesques. La « comédie » des mesures discriminatoires à l’égard des clubs musulmans prendra fin en 1945 à la suite du débarquement américain en Afrique du Nord et l’installation d’un Gouvernement provisoire français à Alger.
Je citerai, en conclusion de ce thème,  quelques phrases du dernier paragraphe de l’étude de Didier REY : « L’administration finit donc par capituler et renonça à son projet de dissolution du football musulman dans le football européen d’Algérie. L’échec fut patent sur toute la ligne. Les circulaires n’empêchèrent nullement les violences sur les terrains…elles ne freinèrent pas non plus l’expansion du nationalisme algérien qu’elles comptaient réduire ; au contraire celui-ci trouva dans ces mesures un terrain favorable à son développement ».
Didier Rey termine son étude en signalant que commissaire de police et sous-préfet de Tlemcen furent  informés que le chant patriotique « Min Djibalina » avait été entonné fin 1945, dans les gradins du stade de Aïn Témouchent, lors d’un match face à l’équipe européenne de Beni Saf!!
Revenons aux compétitions sportives proprement dites pour noter qu’au sein de la Ligue d’Alger, le Mouloudia d’Alger et l’USM Blida, représentants des clubs non européens, n’ont jamais été très performants, exception faite de la première place  en 1945 du MC Alger ex aequo avec l’AS St Eugène.(1) Ailleurs, en revanche, à Oran et Constantine, les clubs musulmans ont su beaucoup mieux s’affirmer et glaner à plusieurs reprises des titres de champion dans leur Ligue respective.
Il en fut ainsi de l’USM Oran qui remporta  7  titres de champion d’Oranie, s’imposant en tant qu’adversaire numéro un des tout puissants CDJ, déjà cité, ASMarine d’Oran et Sporting Club de Sidi Bel Abbés (SCBA), connu pour être le club de la Légion étrangère, dont le siège se situa dans cette même ville pendant plus de 100 ans. L’USM Oran  atteindra même trois fois la finale du championnat d’Afrique du Nord, en 1933, 1935 et 1950 et aussi 1 fois la finale de la Coupe d’Afrique du Nord en 1954. En 1950, le club musulman du Gallia de Mascara viendra rejoindre l’USMO en Division d’Honneur et réussira à s’adjuger le titre de champion d’Oranie, dès la première année de son accession.
Dans la Ligue de Constantine, les clubs musulmans ont été plus nombreux à se distinguer en remportant le championnat de leur Ligue. Ce fut le cas du Mouloudia de Constantine en 1940 et 1949 et de l’USFM Sétif en 1946 et 1951. L’USFM Sétif qui réussira à s’imposer moins d’un an après les terribles massacres, par l’armée coloniale française, de milliers de civils algériens, en Mai 1945, massacres qui avaient endeuillé la ville et toute la région (Sétif, Guelma et Kherrata notamment).
Il y aura eu aussi  l’USM Bône (Annaba) championne en 1947 et surtout l’ESFM Guelma qui récolta 3 titres de champion du Constantinois en 1952, 1954 et 1955. 1955 s’étant avérée l’année faste pour ce club qui, dans la foulée, ira aussi conquérir (2-1) à Casablanca, le titre tant convoité de champion d’Afrique du Nord, face au prestigieux Wydad local. En somme la grosse cerise sur le gâteau !

Attendez nos prochaines publications

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Date de dernière mise à jour : 05/07/2021

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